vendredi 16 mars 2012

Changement de décors

Whouah...!!!
C'est dingue, fou, incroyable...
Comment décrire ?
C'est magique


On oublie.
On croit qu'on oublie.
On se souvient oui c'est sûr, mais les visages se font flous, les couleurs incertaines, la musique lointaine...
Et puis...
Arrivée a Bamako en plein après midi.
Une chape de chaleur me tombe dessus. "Bien sûr" me direz vous.. Mais cette sensation d'être enveloppée toute entière, ce châle pesant, cette brume qui cache le soleil...je l'avais oubliée.
Il m'a fallu quelques minutes pour que mon corps se souvienne.
Autour de moi tout avait changé.
Inspiration, expiration.... On re-ouvre les yeux, c'est donc bien vrai, je suis là !


 Le souffle du Dieu Ventilateur, le goût de la Castel fraîche (bordel Celmish! le goût de la Castel fraîche !! Tu te souviens de ça?!), l'odeur des brochettes, l'accent des gens, le mien qui revient au galop, toutes les petites expressions , les chiens qui dorment le long des murs dans la rue, la circulation folle, les manguiers lourds de fruits bientôt mûrs, l'odeur de la moustiquaire pleine de poussière de sable, celle de la citronnelle le soir pour se protéger des moustiques, les gardiens qui discutent devant les portails.... Me mettre en jupe, écouter un conteur sous la paillote, aller danser, rencontrer pleins de monde..Une foule de chose me reviennent d'un coup, me laisse hallucinée, entre les larmes et l’hystérie... Je fais sourire les locaux...
C'est là, c'est intacte. Tout est là, tout me semble familier, c'est intégré en moi...
          Qu'est ce que ça fait du bien !!

          J'ai passé ainsi deux nuit dans une auberge pour baroudeurs , me demandant comment j'avais fait pour vivre loin d'ici pendant si longtemps et comment j'allais faire dans ma vie pour me partager entre tous ces lieux qui ont accrochés mon coeur..

[Je suis amoureuse du monde.. C'est peut être pour ça que je hais autant ce système qui le défigure..]
      &fbsp+
        Puis j'ai pris la route, avec un gros con (sisi) de blanc venu se faire du fric dans un des endroits les plus pauvres du monde. Comme il le dit lui même "c'est une philosophie de vie, on est pas là en vacance, c'est le bizness.. Je m'appelle pas Mère Thérésa hein !" ...Édifiant...C'est pas l'envie de le faire disparaître sur le chemin qui m'a manqué mais bon, je ne sais pas conduire...

                Arrivée à Bobo il y a maintenant une semaine presque...
Combien de degrés peut il bien faire?
Je suis là, me traînant, pauvre petite toubabou terrassée par la chaleur..
Bobo Dioulasso
Flash back. Retour aux sources.
Je reprends comme si je ne l'avais pas quitté, mon mode de vie ultra tranquille....  Je vis dans une famille d'amis, fais un peu de couture pour réparer les vêtement des mômes, me balade, participe à la bouffe lorsqu'on me laisse faire.. Les vacances quoi !
Discutions, rigolades, politique, embrouilles de quartier et problèmes d'argent..
Je peux ici cracher mon venin sur les riches qui veulent toujours rester riches mais avec la bonne conscience en prime, ça fait rire Odile
"Il ne doit pas y avoir beaucoup de blancs qui aiment ce que tu dis hein! Tu parle trop vrai"..
Peut -être...

Vient le temps où je me pose la question de savoir ce que je fais là.
Pourquoi venir?
Constater une situation sans être actrice de rien... Déjà la fois passée ce questionnement me hantait...
L'état de pauvreté général me frappe.. et qu'y fais-je ?
"Je visite des amis" est la réponse la plus acceptable que j'arrive à donner. Mais en réalité... je m'offre de la découverte. Égoïstement . Je baigne dans le luxe du voyage, d'avoir le bon passeport et suffisamment de moyens pour me promener de par le monde.
J'apprends, je découvre je compare, essaye d'échanger, m'en met pleins les yeux... Pour me construire, m'ouvrir l'esprit, comprendre ce monde. Pour moi quoi...

"Le voyage pour moi, c’est une manière de chercher et d’essayer de trouver dans l’humain ce qu’il y a de plus noble. C’est ce qui me permet de garder foi en la nature humaine. Personne ne peut prévoir l’avenir, c’est pourquoi j’écoute le présent. "

voilà quelques lignes volée à un autre voyageur, Clement , qui me parle si justement par ses mots qu'il me fait décoller, partir avec lui.. partager ses réflexions...

Comment je me retrouve ici alors qu'aucun de mes amis non-français ne pourrait venir jusqu'en France?

J'aime à dire qu'un des axe que j'ai choisi de suivre c'est de comprendre les différents visages de la colonisation. Ici comme en Palestine je vois cette oppression, souvent venue de l'occident, qui maintien l'état du monde, " l'ordre mondial", laissant le nord décideur et le sud toujours plus pauvre.. Comment ne pas vouloir enrayer cela? Au moins ne plus participer, peut être mettre un bâton dans la roue de la machine...
La réflexion est en cours mais le choix est déjà fait.
Oui, je suis révoltée.
Et comment ne pas l'être?
Tant pis si ça vous fatigue, tant pis si ça ne sert à rien
Je veux croire..
Comme dit Clément "garder foi en la nature humaine"

...
Dimanche départ en brousse
 revoir tout le monde, surtout Le vieux Coulibaly.
Je vais faire un petit tour des villages où j'ai passé mon temps la fois passée, j'ai hâte de vivre ces retrouvailles!

dimanche 11 mars 2012

Bonne Arrivée !!!!!!








Je suis au Burkina....

Presque deux ans après en être partie donc.. je tiens enfin la promesse que je m'étais faite de revenir !!
...les mots me manquent..

lundi 5 mars 2012

Le Caire






Rayons de soleil sur le Nil 
Premiers regards sur le Caire
J'ouvre des yeux neufs
Découvre le géant sans prendre part a l'agitation
La place Tahir en point de repère
Loin des sentiers touristiques
En vacances
En convalescence ..
de cette Palestine qui me reste dans la bouche
Comme après un long sommeil
Me promenant dans ma propre vie
Oubliant de visiter les incontournables
Ne suivant que la portée de mon regard
Pas de guides, de musés ou de pyramides 
Tournant les jours comme des pages
Oubliant de "profiter de la chance d'être là"
Mais jouissant de chaque instants
Je flotte
Je suis
en transit

[...]


J'ai la Palestine en tête comme un parfum. 
La magie de l'école de cirque, la voix des amis, l'envie d'apprendre encore, la couleur de l'espoir scotche sur la rétine... dur de tourner la page...
Je jubile de retrouver ici la musique de langue.. 

Puis soudainement l'Afrique est là.
Dans la circulation du soir, au détour d'une expo ou d'une femme qui passe, portant un colis sur la tête
l' Afrique est là.
Sale, belle, bruyante, pleine de couleurs partout et d'odeurs fortes sur les marchés..
Sans que je m'y attende je retrouve des sensations, elle me prend a la gorge et me tire des soupirs ...
Alors, heureuse d'aller la retrouver, je regarde vers l'avant, 
et en attendant, parmi 25 millions d'habitants, je découvre le Caire

[...]


Entre une érgotherapeute Libanaise, qui m'offre de partager son expérience auprès de jeunes autistes en plus de m'héberger
Entre un couple Franco-Italien, amoureux du monde arabe et de sa langue, qui servent de cobayes à mes envies de cuisine
Entre un hôtel bon marché pour voyageurs atypiques tenu par une féministe engagée
Entre ses réceptionnistes homos qui, sans me connaître, m'ouvrent la porte de leurs mondes et de leurs amitiés autour d'un thé, d'une blague ou d'un narguilé
Entre mes balades seule en métro, traversant la ville dans un sens puis dans l'autre, savourant la non-mixité des rames, admirant la beauté des jeunes femmes
Entre le calme des quartiers aisés, pleins d'arbres, et l'agitation de Down Town, pleine de voitures
..
Entre le Proche Orient et l'Afrique
Dans ce patchwork magnifique
Dans ce début de printemps 
Je découvre Le Caire

jeudi 1 mars 2012

Chroniques Irsaeliennes

[Je me suis laissé une nuit de sommeil porteuse de conseils pour finalement décider de recopier tel quel ce que j'ai écrit ces trois derniers jours.. C'est la première fois que je fais mais je crois que mes écrits al chaud sont plus parlant que mes mots d'aujourd'hui. C'est donc écrit du dimanche vers le mardi]


Acte 1- 

          Je me demande presque comment je suis arrivée ici.. Je viens de parcourir deux milliards d'années lumières en 15 kilomètres...

          Je reste un moment abasourdie par l'horreur du monde "réel".
Il ne se passe rien et tout à la fois..

          Je suis assise sur un grand lit bleu, la chambre est moderne et confortable. L'appartement est grand, le frigo vide et il y a 300 chaînes a la télévision. Je passe d'une pièce à l'autre, promène mes mains sur le mobilier impeccable. Aux murs du salon quelques affiches encadrées. L'une titre  " la langue de lumière qui met des ponts entres les gens : l'hébreu"... Une autre est un medley  d'articles à la gloire du premier président d'Israel...
          Où suis je ?
          Mon hôte s'est absenté deux heures me laissant seule ici. Cet un homme est un miracle pour tout vadrouilleur avide de rencontre. Il  fait parti de ces gens qui en 2 secondes vous embarquent dans leur monde, vous acceuillent les bras grands ouvert avec milles histoires de voyages à partager.


          Mais pour la , je crois, première fois de ma vie, mon estomac se retourne en entendant quelqu'un parler. Ses propos me sont indigestes.. physiquement... Parce qu'ils sont la norme ici.

          ... Aucuns bruits autour de moi, tout est calme, mes oreilles bourdonnent, ça hurle même. Le vacarme du silence... Je comprends que cet homme n'est pas un ignoble connard quand il me dit sincèrement que  "le problème, c'est les arabes", il est juste comme tout le monde.. Ici quasiment tout le monde pense ça !!!...

          Je voudrais me réveiller.

          Il a arrêté sa voiture sur le bord de la route, à Jerusalem, alors que je marchais vers un point de stop. Il m'a offert l'hospitalité, me disant que, vu les heures de routes devant moi, mieux vaut s'y prendre le matin. Pas faux. Alors je grimpe, on discute. Il est "cool", ouvert sur le monde, artiste orfèvre depuis 30 ans, joue du djmbé, voyageait en stop quand il était plus jeune.. Les premières questions arrivent et en quelques minutes il me faut rentrer dans mon mensonge de vacances en Israel, ce que j'y ai fait, ce que j'aime dans ce pays, ect.. Je me dis que c'est un bon entraînement pour passer la frontière. Quelques mots d'arabe m'échappent, on en rigole, (ouf !) il me dit que lui aussi en connaît un peu, " quand j'étais petit mon père faisait travailler des arabes sur ses chantiers". Mon visage se crispe, je ne dis rien, regarde par la fenêtre. Là, devant moi, se dessine l'autre visage de cette ville, propre, pleine de jardins publiques, de rues commerçantes... Avant que j'ai le temps de m'en rendre compte je suis propulsée en occident, j'ai sautée dans le grand bain a la découverte de ce qu'est "Israel"... Le choc est frontal...


          Pourtant j'ai juste passé le mur..


[je suis comme les personnages de The Village ou The truman show lorsqu'ils découvrent  "l'autre cote"]

Fin de soirée, on raccompagne quelqu'un à "Gilot", j'ai l'impression d'avoir déjà entendu ce nom, mais où? Pourtant je ne connais rien de ce cote ci.. C'est étrange la route est la même que pour aller au check point de Bethlehem... Et puis l'architecture, la vue au loin, d'un coup tout s'éclaire : je connais Gilot très bien, j'ai pu l'avoir en ligne d'horizon pendant 3 mois .... Gilot c'est la colonie énorme  qu'on voit en face de Bethlehem ...

          Combien de fois me suis je dis  "si ça tombe ils ne se rendent pas compte?".. et bien oui, les gens ne savent même pas que c'est une colonie ! Ils sont justes venus vivre là parce que c'est neuf et pas cher, ce sont juste les nouveaux quartiers.. L'état offre des aides pour favoriser l'accès a la propriété des jeunes..
          "Les lumières au loin? Quelques villages arabes qui restent mais ne t'inquiète pas ils ne peuvent pas approcher"... Quelque part dans ces petits points brillant : Deishe



Acte2-

          Le paysage défile....

          Le front collé a la vitre du car climatisé, j'admire ... la mer... 

On la longe depuis une heure peut être, à droite la montagne se dresse a pic, belle, sur la rive d'en face idem. Seule cette langue d'eau turquoise au milieu du désert.



           Je me cache dans mon pull pour pleurer, je ne veux pas qu'on me vois.
           Où sommes nous ? Sur quelle planète?
Je regarde les passagers autour de moi, la réponse s'affiche: nous sommes dans l'autre monde, dans la bulle israélienne.
          Le tracé de la route évite soigneusement tout panoramas de villes, villages ou simplement trace de vie palestinienne. La Palestine est comme gommée du paysage, oubliée. Tout parait désertique. Ici une station service israélienne entourée de palmiers telle une oasis miraculeuse, là une usine, plus loin une base militaire, les panneaux indiquent les colonies..
          Nous faisons route vers le sud, "le ciel est bleu , la mer est belle, les gens sont heureux sous le soleil". Tout le monde est pressé d'arriver, je suis désespérée ....
 Pendant la pause j'entends du russe, de l'espagnol, du français, de l'hébreu, c'est le grand melting pot... j'entre dans la station service, un café vaut 4 sandwishs falafels a Deishe... 
les larmes reviennent, je me cache encore...


          Plusieurs fois depuis hier j'ai des flash, d'un coup la Palestine me manque, mais je suis en  Palestine...


Ça me brûle a l'intérieur, cette réalité d'apartheid. Je pense a autre choses, à ma route qui continue [...]  Je rouvre les yeux, le car est toujours là, horreur..
          Impression d'être dans de la science fiction, ce n'est pas possible, ça n'existe pas, nous ne sommes pas en train de rouler comme se de rien était sur cette terre volée alors que mes amis vivent dans un camps de réfugiés. Autour de moi tout le monde s'en fout, a hâte d'arriver à destination, il n'y a pas de problème pas de Palestine...
          Vous connaissez ça ? Quand la vérité est si insoutenable qu'elle donne envie de vomir, qu'on ne veut pas la croire..


          Je voudrais avoir quelqu'un avec qui en parler mais ceux qui m'entourent ne voient même pas ce que peuvent être des Palestinien, il n'y a que des arabes et ce mot leur fait peur.. C'est l'indifférence générale alors que mes amis attendent, parlent, rêvent du "jour où".
          Le jour où ils iront a Jerusalem pour la première fois, celui où leur frère sortira de prison, le jour où il n'y aura plus de zone C, le jour où ils contrôleront leurs frontière et pourront décider eux même de la durée des visas des étrangers, le jour où eux aussi pourront voyager, celui où ils n'auront plus peur des soldats la nuit, celui où ils pourront de nouveau exploiter l'eau et rendre a la vallée du Jourdain sa luxuriance légendaire, le jour où nous feront tomber ce mur...
           Ici ce jour n'est même pas un cauchemar, il n'existe juste pas.

          Personne ne s'imagine une seconde revenir en arrière..




Acte 3-

          Il est 18h54, il fait 19
°

          Les jeunes filles en mini short sont parties se chercher un pull pendant qu'ici et là on enlève les matelas des transats.. A ma droite s'élève le SHOPPING CENTER avec son enseigne en grosse lettres lumineuses. Dans mon dos la, longue, promenade et les hôtels "face mer" en arrière plan. Des centaines de bars, boutiques de souvenirs, vendeurs de glaces, restaurants, magasins de grandes marques,stand d'accessoires hippies, ect, se succèdent sur au moins deux kilomètres...
          Nous sommes a Cannes, Nice, Biarritz...
 Les jeunes se baladent en bandes et se draguent sur la croisette, ça se questionne sur tel bracelet brésilien, tel collier a plume ou telle lunettes de soleil..

           Eilat, la station balnéaire au bord de la mer rouge.

          Je me suis assise au bord de l'eau pour écrire plutôt que d'hurler..
La Palestine, ma vie là bas, les gens que j'y ai rencontré, tout me manque... et pourtant.. j'y suis toujours.
          La Palestine est là quelque part.. partout sous ce béton et ces hôtels de luxes, dans les milliers d'années d'histoires qui résonnent ici, dans ces pierres, dans les centaines de générations qui ce sont succédés sur ces rives, dans les reflets argentés du soleil qui se couche sur la mer ce soir..

          De l'autre coté de l'eau, les lumières d'une ville Jordanienne s'allument, quelque part vers la rive un mat très haut porte un drapeau immense.. celui de la Palestine

          Et dire que certains m'ont trouvé "bien du courage" d'aller à Deishe, on s'est enquéri de savoir si le "climat politique" n'était pas trop pesant... Mes amis ce ne fut qu'un doux rêve comparé à ce qu'endurent mes nerfs et mon coeur ces deux derniers jours..
          J'ai tant reçu là bas.. ici l'individu est roi..
          Deux jours cauchemardesques, pourtant je suis passée du "bon coté", les rues sont bordées de palmiers, les taxis ont des conteurs, tout le monde se sape comme il lui plaît, ça sent l'air de la mer et de la liberté.
C'est l'Europe, viens cluber avec nous ce soir... " Enjoy" me répète t-on partout...

          Enjoy Valou, oublie
car de ce cote ci, regarde, tout le monde s'en tape de tes histoires......

          Pas un jour depuis trois mois sans que je n'entende parler de politique ou "d'Israel". Pas un journal télévisé sans évoquer la "situation", l'armée, les nouvelles attaques de colons, les nouveaux vols de terre.. Toute une population qui voit sa terre, ses droits, sa liberté diminuer en direct live. Qui s'en arrange pour certains, qui continue d'y croire et d'espérer pour la plupart..

          Et ici, autour de moi sur la plage, c'est comme si ça n'existait pas... Je n'ai pas entendue une seule fois le mot Palestine depuis mon départ...

Je l'écris honnêtement, je ne pensais pas qu'il serait si dur d'être témoin de tout ça..


Acte 4-

          En attente de visas

Vraiment ici c'est le paradis, l'été toute l'année, tout ce que l'on peut désirer a porter de main.
Quelques femmes, cheveux au vent et tongs aux pieds, promènent une poussette en fumant une blonde. Une voiture de sport passe et klaxonne un ami qui lui répond par de grands signes en criant "Hi !!".
C'est  la fête..

          "Whou! Le bonheur est partout
            ça dégouline, c'est fou
            ça va pas être facile de trouver son style
           Allez.."

          Première démocratie capitalisme du monde, finalement c'est assez vrai, si tu passe le casting d'entrée...

          Il n'est pas midi mais déjà le soleil tape fort. Je me réfugie dans la poste, grand hall climatisé. Un homme, la cinquantaine, m'aborde et me drague assez directement en français. Je regarde autour de moi me disant que quelqu'un va le reprendre , on ne se connaît pas et je pourrais être sa fille.  Personne ne nous prête la moindre attention...
          C'est le cinquième qui fait ça en 3 jours, je ne comprends pas pourquoi, je suis perdue, ça me dérange totalement. Non seulement parce que je n'ai pas envie d'avoir a repousser leurs avances mais surtout parce qu'ils ne semblent jamais entendre la distance que je pose.
            Alors c'est ça la liberté?
On fait ce qu'on veut, chacun sa geule ... ?
            Il me dit de venir le visiter au café qu'il tiens sur la plage, ce a quoi je répond que je quitte "malheureusement" Israel cet après midi pour l'Egypte.
Et là, il s'affole :
           " Mon Dieu non ! C'est dangereux, ne vas pas en Egypte, non!"
Je lui demande pourquoi
           "Ils sont fanatiques là bas ! T'as pas vu? Les femmes avec tous ces bazars sur la tête... Quand ils vont voir une créature comme toi... Non, non, c'est vraiment une mauvaise idée... Les arabes n'ont pas de coeur, tu sais ça? C'est vide là ( il me montre sa poitrine)...  Non, vraiment c'est dommage.. quand ils vont te voir ils vont vouloir te voler"
finit il en regardant fixement mes seins.

...j'ai littéralement envie de tuer ce type sur place, là, sans autre motif.. Mais ici ce n'est même pas du racisme, au contraire, c'est une sorte de bienveillance, il me met en garde... Alors je prend le sourire le plus sympa que j'ai en stock et lui répond : "Et ben! J'espère pas, mais je serais prudente promis"
             Au moment de m'en aller il ajoute
 " juste une règle : ne leur fait jamais confiance, ils ne savent pas ce que c'est"
            Je le remercie et m'en vais.

300 mètres plus loin je m'assoie.. je n'en plus... vraiment...

            Quelque part de l'autre cote de l'eau, le drapeau flotte toujours.
Je me relève et marche vers l'ambassade pour chercher mon visa. Enfin, je marche vers la sortie..
         

Dernier acte-

          Je file a la frontière en bus avec mon énorme sac, passeport tamponné en poche.

           Quelques centaines de mètres avant il y a comme un bouchon, les voitures ont l'air d'attendre. Le chauffeur dit "Ah... c'est fermé.." Ah non !! Je saute du bus et trouve d'autre jeunes baroudeurs qui m'apprennent que l'armée est en train de désamorcer une bombe et ont donc bloqué le passage.
           Manquait plus que ça!
Un petit robot est envoyer risquer sa vie de cyborg pour sauver la situation.. Pendant ce temps l'un des jeunes me demande à quelle heure est mon bus.... Mon bus ? Quel bus? " ben le bus de l'autre coté, tiens!"   Merde!!! J'ai totalement oublié de me préoccuper de ça !! C'est sur ça va paraître louche s'ils me demandent ou je vais et que je n'ai aucune infos... Je m'empresse de leur emprunter un guide et de retenir le nom d'un hôtel puis demande l'air de rien à celui qui va au Caire si je peux le suivre un peu, puisqu'il connaît, pour les bus "comme ça je ne me perdrais pas"...on est toujours moins suspect de faire du tourisme à deux..
           1/2H plus tard le robot est de retour et on apprend que c'est au moins deux fois par semaine qu'une valise se transforme en prétendue dangereuse bombe mais qu'en fait il n'y a jamais rien..

          Voila, ça y est, le grand moment. J'angoisse à mort. Je m'efforce de faire ami/ami avec les autres, de faire des blagues dans la queue pour présenter son passeport. Je veux avoir l'air détendue mais lorsque j'arrive au guichet mon état de nervosité bat les records.. La douanière met beaucoup de temps a contrôler mon passeport puis finalement me demande où est mon visas d'entrée. Je lui indique la page, elle tamponne et je m'en vais vers l'étape suivante...100 mètres plus tard et un petit portillon de passé  je vois écrit en arabe et en anglais WELCOME IN EGYPTE... Je me retourne vers mon nouveau camarade incrédule " Israel c'est fini?!", "ben oui, on a passé la frontière là"
          Whaouw.. j'aurais hurlé de joie si je n'avais pas eu si peur qu'ils changent d'avis et m'emmènent passer 10H d'interrogatoire pour expliquer ce que j'ai fait pendant ces trois derniers mois..

          D'un coup tout m'a paru fantastique. Tout était formidable... Jusqu'à la grève des bus censés nous emmener au Caire, mes compagnons étaient scandalisés, horrifiés, moi je trouvais tout génial. J'ai lance fièrement " Malhaba" au premier Egyptien venu et mon co-passeur de frontière m'a dévisagé " mais... tu parle arabe.. ?"... Ah ah ah ! Génial !

          Le vent du Sinai me souffle dans les cheveux. C'est fini...