mardi 21 février 2012

le vent nous portera


          Bon ce coup ci ...
... j'ai eu beau regarder ailleurs, feindre de ne pas entendre les questions a ce sujet, oublier de consulter un calendrier, ect... cette fois ci ça sent le départ.
Sérieusement.

Et je n'ai pas envie
                Oh non !  Pétain , j'ai pas envie...
on ne peux même pas dire que j'y aille a reculons, plutôt traînée par le visa !

          Inextricablement la date arrive : au premier mars je doit être partie.
Et comme chaque fois que mes actes sont dictés par autre chose que par mes envies ou la nécessité, je me sens acculée, mal ... Je ne sais décidément pas me plier aux lois que je trouve absurdes sans en souffrir de tout mon être.
Je hais ces lois je hais ces frontières.


          Surtout que, devinez quoi : j'ai pas trouvé de bateaux.. encore une fois..
A ma décharge je peux tout de même dire qu'il n'y en a pas, ni au départ d'Egypte, ni au départ d'Israel, ni ferries, ni bateaux particuliers.. J'ai sillonner les sites de convoyages dans tous les sens rien !
Que me restait il comme option ? La terre : au nord Irak et Syrie, tout a fait impossible de passer, les frontière sont fermées. Au sud le Soudan puis le Tchad et le Niger pour rejoindre le Burkina. Ça me faisait un peu peur au début mais finalement,  à force de me renseigner j'ai vu que le nord Soudan pouvait être tranquille, que le Tchad est un pays pauvre mais qui a l'air magnifique..
Une fenêtre qui s'ouvre !

 .. jusqu'à ce que j'apprenne qu'il est impossible d'entrer au Soudan avec un visa Israélien sur son passeport...


          Alors encore  une fois au pied du mur, un billet d'avion est pris pour rejoindre Bamako depuis Le Caire, et de là j'irais en stop vers la Burkina...
Je hais ces lois, je hais ces frontières.

Ces histoires d'avions me sont bien plus douloureuses que ne peuvent le décrire mes mots, mais savoir que mon voyage ne s'arrête pas là me sauve...

donc
dernière ligne droite
pourtant rien n'est rectiligne ici
encore quelques souffles de ce froid du soir
encore quelque cris d'enfants dans cette cour
encore quelques bouffées d'air sur cette colline
encore quelques mots d'appris pour faire du sens
encore quelques appels a la prière pour me chanter l'heure
encore un peu de répit en fait : 5 jours.. et après la route reprend direction l'Egypte
..
pendant ce temps dans ma tête résonnent les paroles de  A l'envers ,a l'endroit de Noir Désir

samedi 11 février 2012

Decalage horaire

15h

          Un sourire passe sur le visage d'Anan lorsqu'il m'entend demander une clope.
Je ne fume pas, tout le monde le sait parfaitement.
-"Un peu stressée, hein? "
-"Un peu, oui "
... pas mal même.. Ce dimanche c'est un peu pour moi " l'heure de vérité ".

Mais c'est surtout la nuit qui fut rude, qui me colle au ventre..
          Intercontinental Hôtel un samedi soir...
Envie de vomir ce que je découvre de plus en plus. 

Ce décalage

          Intercontinental Hôtel un samedi soir... 
Inter continents... 
Alors comme ça ici on fait des ponts par dessus les mers ? 
Mais on ouvrira pas la porte a ses propres voisins s'ils n'ont pas le porte monnaie a l'européenne.

          Foutue société de classes, ici comme ailleurs..

          Ici les riches règnent en maîtres, les occidentaux sont chez eux. 
Laisse ta politique au vestiaire, tu es la pour prendre du bon temps...
La personne qui m'invite ne comprend pas pourquoi je "m'obstine" a vivre a Dheishe. 
" Tu t'éclates vraiment la-bas? "
Le mépris évident de sa question me laisse silencieuse... 
Selon lui ce n'est pas un endroit où rencontrer qui que ce soit d'intéressant puisque les gens y sont incultes, souvent violent, feignants, sectaires, communautaristes, ne font rien pour s'en sortir et que la vie y est ennuyante..
Rien que ça ... et sans aucuns préjugés bien sur!
         . Mais je dois remercier ce jeune homme car c'est en le côtoyant depuis bientôt deux mois que j'ai compris comment sont perçus les camps de réfugiés par le reste de la société Palestinienne:

          Grandement aidé par le discours des médias, les camps de réfugiés de Cisjordanie sont de plus en plus perçus comme le sont les quartiers dit "sensibles" (autrement dit banlieues) en France.Chômage, violence, confrontation avec la police, ect. sont autant de problèmes qu'on retrouve dans les deux cas et qui sont sources de bien des préjugés.

Tout comme en France donc, on attribue ici bien des problèmes aux jeunes des camps, sans prendre en compte les conditions de vie pourries qui en sont la raison :
 énorme concentration de population, logements précaires et entassés, pas d'espaces verts, proximité immédiate avec tes voisins, absence de perspective d'avenir intéressante (ou d'avenir tout court) , discrimination par le reste de la population, surveillance des forces de l'ordre bien plus marquée qu'ailleurs, contrôles et arrestations arbitraires fréquents, répression beaucoup plus forte et violente qu'en ville, ect..
On considère les problématiques qui y sont liées comme venant de la population qui y vit plus que du cadre en lui-même.
Le parallèle est criant.
... et les médias jouent le même jeu des raccourcis gentils/méchants : ouverts d'esprit-européanisés contre radicaux-traditionalistes.
Et puisque les réfugiés ne peuvent se satisfaire de leurs conditions de vie, ils ne lâchent pas la lutte, ce qui en fait des ennemis pour l'Autorité Palestinienne qui tend, elle, vers la collaboration et la "normalisation" de la situation.
Alors pointer les jeunes des camps (ou banlieues au choix) comme étant le problème c'est très arrangeant.
Encore une fois on criminalise ceux qui se politisent un peu trop.
Ça ne vous rappelle rien vous?
(...)
rage

          Intercontinental Hôtel ce samedi soir ...

À 25 shekels l'entrée aucuns de mes potes n'aurait pu venir.
Les seules personnes issues d'un camp de réfugiés que je croiserais sont serveurs ou vigiles...
Cet endroit a un sale goût de lieux d'expos branchés où l'on voit des photos des favelas de Rio mais où l'on s'affole quand se pointe des jeunes des quartiers populaires .. 
Je me sens mal a l'aise. 
Les conversations m'ennuient alors que pour une fois je les comprends puisque tout le monde se parle en anglais. Dans la jeunesse dorée si tu n'as pas étudié a l'étranger tu as au moins été au lycée américain... 
On me pose quelques questions, je deviens vite "exotique" avec mon périple en stop, mais je me sens asociale, seule la musique m'intéresse. 
Finalement pas envie de faire des ponts...
On me drague assez clairement et je ne sais plus ou me mettre. J'ai pris goût a la pudeur des gens du camp, a ne pas faire la bise, a garder les manches plutôt longues, ect.. 
-Moi qui suis souvent vue comme féministe !-
C'est qu'il y a quelque chose de sécurisant dans un cadre, aux moins tu connais tes limites.
Ici je ne suis pas a ma place.

          
          Je rentre tard mais soulagée de revenir au bercail .
Je vole quelques heures de sommeil avant d'être sur le pied de guerre pour ce dimanche "Circus Show".

10h
Deux questions turlupinent ma petite tête ce matin tandis que je profite du soleil miraculeux devant le centre:
Combien d'enfants vont venir 
et a quoi ais-je oublie de penser ?

C'est la première chose qui se passe entièrement a mon initiative ici.
Il y a trois jours, début de l'angoisse en me rendant compte que les affiches et les centaines de tracts etaient toujours poses sur le bureau.. les volontaires avaient un peu "oublié" de faire la com...
Détail ...
Detail un poil embêtant lorsqu'on sait que la troupe de cirque fait 3H de trajet aller-retour, sur leur seul jour de congés, pour venir faire la représentation gratuitement, en ayant comme seule demande qu'il y ai le plus d'enfants possible....!

13h
Le centre est si calme.. désert.. ça en devient flippant
On dispose quand même 150 chaises sans savoir si elles seront occupées...
Et puis l'estrade me parait petite tout a coup. Bon on verra.
Et merde, on a oublie de leur prévoir des sandwishs..

16h
Les enfants arrivent par vagues de 4 ou 5
Je suis heureuse de les voir, j'en reconnais certains
Le spectacle est dans une 1/2h, pas de trace des circassiens..
(...)
Quand leur camion débarque enfin  c'est la pagaille totale, un bordel monstre !
Je compte sur les volontaires, qui eux, comptent sur moi..



un triporteur, quatre clowns acrobates, une énergie qui nous éclabousse...
   



Bilan:
Plus de cinq cent personnes sont venues
Un bon quart n'a rien suivi mais était de toutes façons plus là pour voir les potes 
Tout le monde a paru très content de partager ce moment
Surtout les volontaires, allant et venant bras-dessus bras-dessous (on les aurait cru a la boum de fin de colo), oubliant un peu trop les mômes, aidant ainsi au bordel ambiant.
Et même les circassien, épatants, qui ont réussi je ne sais comment a finir leur spectacle, m'ont dit qu'ils étaient ravis d'être venus !
 Moi je suis fière de cette réussite malgré les petits défauts. 
Finalement un vrai travail d'équipe qui offre un super moment populaire.


Victoire









..et des centaines de sourires et de paires d'yeux grands ouverts  !

mercredi 1 février 2012

Ecrit sur un tronc d'olivier, poeme

Parce que je ne file pas la laine                            La marque de toutes les menottes
Parce que je suis chaque jours                             Fermées sur mes poignets
Aux mandats d'arrêts                                           Les bottes de mes gardiens
Et ma maison exposée                                        Chaque juron                                 
Aux descentes de polices                                     Versé sur ma tête                         
Aux perquisitions                                                Et je graverai                                   
Aux "opérations de nettoyages"                            Kufer Qassem                 
Parce que je suis dans l'impossibilité                    Je n'oublierais pas             
D'acheter du papier                                              Et je graverai                              
Je graverai tout ce qui m'arrive                            Deir Yassine                   
Je graverai tous mes secrets                                Ton souvenir me dévore                     
Sur un olivier                                                       Et je graverai                                             
Dans la cour de ma maison                                   Nous avons atteint le sommet de la tragédie
Je graverai mon histoire                                       Nous l'avons atteint
Et les volets de mon drame                                  Je graverais tout ce que me dévoile le soleil
Et mes soupirs                                                      Me murmure la lune
Sur mon jardin                                                     Ce que me narre la tourterelle
Et les tombes de mes morts                                  Sur le puits
Et je graverai                                                       Dont les amoureux ce sont exilés
Toutes les amertumes                                           Pour m'en souvenir
Qu'effacera le dixièmes des douceurs futures         Je resterais debout a graver
Je graverais le numéro                                          Tous les volets de mon drame
De chaque arpent spolié de notre terre                   Et toutes les étapes de la défaite
L'emplacement de mon village, ses limites              De l'infiniment petit
Les maisons dynamitées                                        A l'infiniment grand
Mes arbres déracinés                                             Sur un tronc d'olivier
Chaque petite fleur écrasée                                    Dans la cour
Les noms de ceux qui ont pris plaisir                      De ma maison
A détraquer mes nerfs et mes souffles                          Tawfiq Zayyad,
Le nom des prisons                                                     Extrait de
                                                                                        Enterrez vos morts et levez vous


on parle d'un million et demi d'oliviers
que les forces d'occupation israéliennes (colons et armée) auraient brûlés ou déracinés depuis 2000

lundi 23 janvier 2012

donner des nouvelles

   Entre deux coupures d'électricité ou d'internet je me réfugie sur ce blog pour écrire. 
Ahh.. un territoire connu, douillet.. C'est comme mettre ses chaussons en rentrant chez soi en hiver.
J'ai donc réussi a faire de ce blog un jardin ou me sentir bien. Surprenant...

Pas facile de raconter comment je vais...
Je n'arrivais pas a mettre le doigt dessus mais en relisant une brochure sur la vie en squat, j'ai compris, ça y est, ce qui me manque c'est la vie collective.


   Je vis dans un lieu public et vois du monde tous les jours, mais ne partage rien de l'ordre du quotidien. Je ne fais pas partie d'un groupe avec lequel je construit une vie collective : lorsqu'arrive le soir les gens rentrent chez eux.. et moi je reste ici..
Il me manque les moments de complicité ou l'on se fait des blagues.. Les petits dej' que l'on prend a plusieurs et les films qu'on regarde, le soir, a quinze entasse-e-s sous la couette..

Les 5 années précédentes de ma vie m'ont amenées a aimer l'idée du "collectif" quel qu'il soit, a y trouver une force, un refuge, parfois un défit, souvent un moteur.
 Ici je ne me sens pas de liens suffisant avec qui que ce soit pour aller frapper a une porte et passer une soirée... Et puis je suis une fille et la plupart des gens que je rencontre sont des garçons, je vois quelque chose de difficile dans la relation, on ne se pointe pas "comme ça" dans mon cas il me semble...

      Alors je me nourrie de ce qu'il se passe la journée dans le centre et des nouvelles d'amis que je reçois (Simon, si tu lis ces lignes un sous entendu se cache dans la phrase....). 
Ici ce sont les vacances scolaires pour une semaine encore du coup il y a un peu plus de vie. Youpi!!
Je participe aux temps d'activités avec les enfants, mais je suis aussi observatrice de leur manière de fonctionner. A la demande des volontaires (!) je vais participer avec eux a leurs temps collecifs sur leur pratique . L'idée c'est de réfléchir, se former.. J'aime cet échange autour de l'animation, tant avec les enfants qu'avec les volontaires, ça me fait du bien.

An advanced student by Stefano Morelli
     A cote de ça j'ai envie des envies de "culturel" : cinéma, théâtre, cirque ,danse..
 Du coup j'essaye d'organiser pour dimanche prochain une représentation de l'École de cirque Palestinienne avec leur spectacle "rêve a vendre". J'espère que ça va marcher, le show est super, leur énergie aussi, c'est vraiment un moment de plaisir !
Et puis il y a aussi l'idée de faire des séances de cinéma puisqu'il n'y en pasa Deishe. Ça me tiens vraiment a coeur, après je ne sais pas encore comment ce sera réalisable, il faut trouver les films...
L'idée est bien sur d'avoir des films intéressant, dans un arabe compris par les gens  d'ici, de préférence pas que politiques et par des réalisateurs de la région si possible. 
Pour l'instant j'en ai un, chouette, mais ça ne veut pas dire que les gens viendront a la séance..

Voila un aperçu de ma vie.. 
Qui se déroule entre anglais, arabe, français et un peu d'italien. Le grand mélange linguistique quoi !

Sinon je cherche un bateau et c'est pas encore gagnée !
Je me suis jetée a l'eau en répondant a toutes les annonces possible mais malheureusement il n'y en a pas tant que ça pour traverser la méditerranée. Je navigue donc sur internet en attendant de le faire pour de vrai.
Et cherchant un navire pour rejoindre l'ouest, j'en ai trouve un pour partir a La Réunion  ! Fou non !
 Comme les choses arrivent... 
Départ en mai sur un voilier comme équipière, retour on ne sait pas.. Rien n'est arrêter encore mais le rêve commence a s'installer dans ma tête..

 D'ailleurs si quiconque a, de près ou de loin, des connaissances qui partent du moyen orient vers l'ouest, n'importe ou : Italie, Grece, Croatie, Espagne, Maroc, France... Je suis très, très preneuse !!!!!

Clef et brouillard

            C'est en écoutant hier soir les questions d'un groupe d'élus Français, venus découvrir la Palestine (occupée), que je me suis rendu compte du brouillard que l'on a dans la tête s'il on manque d'infos.
Je me souvient maintenant combien tout cela me paraissait obscur avant d'étudier un peu l'histoire de cette région, et aujourd'hui j'apprends toujours.... J'y vois de plus en plus clair mais mon quotidien est truffé de moments ou je ne comprend pas/plus alors pour vous ce doit être pareil.
Je ne sais pas comment traduire la réalité de ce territoire tant elle est multiple et complexe mais je vais essayer d'être plus attentive a cela, je promet.

Alors d'abord pour les acharné-e-s, deux  livres : L'orientalisme d'Edward Saïd, et  Le Proche-Orient éclaté de George Corm, dont voici un extrait

"En réalité,l'observateur historien n'est jamais au bout de ses surprises au Proche-Orient. Qui aurait pensé en effet au début du siècle dernier que la Palestine historique, celle des Cananéens, celle des antiques royaumes d'Israel, du Christ et du mont des oliviers, celle de la magnifique mosquée du calife Omar a Jerusalem, deviendrait l'état d'Israel, la puissance militaire la plus redoutable après celle des États-Unis, de la Russie et de la Chine ? [...]
Mais qui aurait pensé aussi qu'en pleine époque historique de décolonisation et de mise en pratique des grands principes modernes de la liberté des peuples, le monde dit "civilisé" laisserait faire une colonisation de peuplement de l'ensemble du territoire historique de la Palestine, achevant la dépossession des Palestiniens, en dépit des très nombreuses et très claires résolutions des Nations Unies, et alors qu'ailleurs, en Afrique du sud ou en Rhodesie, ou même au Timor-Oriental, les colons ou les oppresseurs avaient du lâcher prise et rendre 
leurs libertés aux indigènes asservis."
George Corm,

(Qu'il me pardonne s'il trouve un jours ses lignes ici et ne les estimes pas assez re-contextualisees. Je salut cet auteur qui écrit l'histoire sans lui enlever sa complexité, préférant éclairer plutot qu'eblouir par un récit divertissant.)



Et puis une vidéo, dont j'ai entendu l'éloge comme la vive critique ,mais que moi je n'avais finalement pas vu jusque hier.
 Elle a le mérite de montrer des images de Deishe et de traiter des enfants dans le camp, ce qui peut venir compléter ce que j'avais écrit ici.
Elle parle de Tamer, un enfant qui vit ici et qui, comme bien d'autre, porte un discours très politisé malgré son âge.

«Permis de Jouer » pendant un conflit :
Les Territoires Palestiniens Occupés, ou la difficulté de grandir dans un contexte d'occupation et d' enfermemen
t.

http://vimeo.com/10891365



Et pour finir une carte qui permet de comprendre mieux le découpement du territoire au fil du temps:


Pour expliquer un peu : lorsque je parle, moi, de La Palestine, je parle de l'ensemble du territoire historique.
 C'est bien sur un choix politique: je ne nie pas l'état d'Israel mais refuse de donner son nom a cette terre.

dimanche 22 janvier 2012

a dada


        ..Ici, ironie du sort, je suis devenue plus ou moins la fille qui fait "des trucs avec le cheval"..
Mmhh... oui, mais ça veut dire quoi ? Parce que pour l'instant il n'y a pas tant de choses de concrètes.

  Alors voici quelques photos des "trucs" que je fais, que l'on fait, autour de cette jument (buterfly) en attendant de trouver une plus grande cavalerie.
 Dans le désordre il y a :
 faire des balades, travailler en longe avec ma voix, accompagner Ludo qui apprenait les bases, apprendre le pansage avec Jalil et Cots et profiter des quelques rares rayons de soleil qui passent ( il pleut depuis 10 jours)...






l'homme au cheval

jeudi 12 janvier 2012

"bonne" annee..


Qu'est ce que l'on fête ? Le début de celle qui arrive ou la fin de l'année?

On ne sais plus vraiment...
Qu'est ce que cette nouvelle date va impliquer vraiment ? 
Sentir que le temps passe...
Quelle est la dose d'espoir de changement que l'on s'offre dans cette fête?
Ici l'espoir se deal comme une drogue...

Certains l'entretiennent comme un beau jardin, d'autres se le passe comme un héritage de famille, les politiques en assaisonnent leurs discours pour arriver a leurs fins , ceux qui l'on perdu se traînent entre résignation, douloureux compromis et collaboration
...

On se souhaite une belle année, on fête ce passage vers l'avant ... mais est ce que nos bonnes résolutions vont faire l'année qui vient moins pourrie d'inégalités?

Alors moi j'ai envie de fêter nos révolutions silencieuses.
Celles de tous les jours, intérieures. 
Celles que l'on gagnent contre nos propres peurs, les luttes menées pour moins s'ignorer, pour laisser de la place a l'autre, pour rêver a plusieurs
...

matin du 31 décembre...
          
                  ...un bruit m'interpelle dehors alors que je me lève. Je regarde par la fenêtre de ma chambre et vois 3 enfants qui jouent dans la rue qui descend du centre Al phoenix vers le camp. Arme d'un vieux freesbe pour l'un, d'une sorte de tuile en plastique géante pour un autre, ils se laissent glisser dans la pente raide...
                   ...Ils font de la luge...
     Je fais le lien avec la date du jour et m'extasie un instant de la magie de l'histoire : avec mon frère quand nous étions petits, chez mes grands parents, a cette même période de l'année, nous avions le même jeu..
                    Mais nous avions de vraies luges....
      Et passé l'exotisme, passé l'émerveillement que les enfants jouent quoi qu'il arrive, je me rend compte du mythe que je transporte : croire qu'ils se "satisfont" .
                    Des phrases comme "la-bas, une ficelle, un bout de bois et ils sont contents", résonnent dans mes oreilles.
      Enlève a des enfants européens les supers jeux manufacturés en plastiques colorés qu'ils viennent de recevoir pour Noël, tu ne leur enlèvera pas l'envie de jouer pour autant..
     Donne a ceux-la de meilleurs moyens ils joueront d'autant plus, ce sera plus facile, peut être plus épanouissant. 

Dheishe
De ce que j'en vois et en entends, grandir dans un camps de réfugiés c'est ne pas avoir de place pour être môme. Pas d'espace pour jouer, pas de parc ou traîner, pas de plage, de foret, de bocages pour se promener, observer, expérimenter... 
Alors tout cela se fait dans la rue , l' Espace Collectif.
Ça veut dire jamais vraiment seul. Ça veut dire toujours le même décors. La rue ce n'est pas l'espace des enfants, c'est celui de tout le monde, par défaut... Lieu d'interaction sociale ou chacun s'aménage une place...
Alors oui bien sur "ils jouent tout de même", mais l'occupation les privent d'espace pour grandir,  de la possibilité de "s'évader" du quotidien.

Est ce que ne pas se laisser mourir d'ennui, est ce que faire quand même "avec" (parce que c'est la dedans qu'on grandi), c'est se satisfaire ?..
       Je ne crois pas. Personne ici ne me parait "satisfait" de vivre dans ce camp, d'être réfugiés, de n'avoir que ces conditions a offrir a ses enfants..

                     Je rêvais donc d'un canon a neige et d'une baguette magique quelques instants
...
 
       Le soir, nous sommes invites a fêter le nouvel ans avec un petit groupe d'amis palestiniens, moi je suis la seule fille.... La" fête" est dans une très belle maison en dehors du camp, c'est  immense, en cours de construction,  prêtée pour la nuit.
       Je suis très curieuse de découvrir a quoi ressemble ce genre de soirée, j'observe. Tout est prévu pour ne pas manquer, je sais que c'est pour l'occasion exceptionnelle : quantité de viande pour le barbecue, houmous, boissons, alcool en tous genres, narguilé..
        Dans cette immense maison vide et froide, un lieu ou être "libre" de boire, de faire la fête.. Je comprend que ce qui importe est d'être la, ensemble.


                     Arrive minuit et l'on se souhaite tout le bonheur possible... Dehors résonnent les premiers feux d'artifices. Les voisins en tirent eux aussi depuis leur terrasse..en tenant les bases directement dans leurs mains !! Les fous... Il n'y a bien qu'en Palestine que je verrais ça !         
       
      Tard dans la nuit un ami prend son oud (instrument a corde traditionnel du moyen orient) et nous offre sa musique.. Les autres ont chantés pour l'accompagner puis tout le monde s'est tue, l'écoutant jouer, se laissant transporter jusqu'au petit matin...
       Heures de paix et de bonheur...
                                                     ...pour entrer dans l'année 2012, dite du chaos...





mardi 10 janvier 2012

Voir et entendre

On m'a demande une recette ?!

                   Alors la je saute de joie !
 Parce que s'il y a bien une chose que je fais de ma vie ici c'est manger ! La cuisine Palestinienne est délicieuse et si riche qu'il parait impensable d'en avoir marre..

                  Donc pour les yeux , les papilles et les oreilles voici une vidéo faite par l'association française Regarde a vue qui explique comment faire un maklouba (signifie "renversé"), plat typique et excellent.


http://regardeavue.com/tag/palestine/
 (descendre sur la page, c'est au 12 mars 2011)

dimanche 8 janvier 2012

Ballade a Ramallah

Ah... enfin, je retrouve l'envie de raconter...

          Dernière semaine de décembre, je me rends pour deux jours vers la capital "politique" : Ramallah.
          C'est la première fois que j'y vais seule, ça me fais un peu un truc au ventre d'avoir a me débrouiller comme une grande fille mais je sais qu'au pire j'arriverais dans la mauvaise ville, et puis je suis contente de gagner en autonomie "chouai chouai".
       
           Le trajet pour y aller, de jour, est un véritable voyage. Comme ces paysages sont beaux...  On dirait le dos de gros animaux assoupis les uns contre les autres( peut être des hippopotames, des rhinocéros, ou des dinosaures disparus, on ne saurait dire). Les plis de leurs peaux sont des sillons creusés par l'eau, le vent, le temps... Ces monts, creux, vallées, collines, qui se touchent, se superposent, si proches, lointains, jouent avec les perspectives. Le relief est doux comme si ici, la terre était plus vielle...
Et nous surplombons tout cela en bus, nous, tous petits.
...Impression d'avoir de la hauteur...


Splendide.

         Les routes et autres empreintes de l'homme me paraissent être des injures, réellement..
C'est la que je me rends compte a quel point je n'ai pas l'habitude d'avoir des vues que nous n'avons pas façonnés. Finalement, nous ne connaissons pas la nature inchangée...

         ...et après tous ces paysages... : les check-points, le mur (électronique d'abord, puis celui en béton..armé), puis les routes spéciales pour les colons, puis les belles routes israélienne "partagées" , puis les panneaux en hébreux , puis les réserves d'eau volée , puis les stations services israéliennes, puis les militaires et les détours que l'on fait pour les éviter...Arrrghh !!!
La question, naïve, me vient sans y réfléchir :   mais pourquoi viennent ils jusque ici ?!?  Pourquoi cette présence partout ?? Nous sommes en Palestine !
L'occupation...
Oui avoir la rage est possible, facile, les raisons en sont omniprésentes.
          Et a la fois la colonisation sait faire "accepter" les pions qu'elle avance. Ce n'est pas pour rien qu'une partie des routes israélienne ont le droit d'être empruntées par les Palestiniens. Et si elles sont superbement entretenues, conçues pour un trafic dense, éclairées... ce n'est pas pour rien qu'elles sont plus pratiques que les routes palestiniennes, avec le temps elles sont devenues presque nécessaires...
(...)

          Ramallah donc,

Un peu d'oxygène dans mon enlisement...

...au centre le quotidien me colle 
           Je suis venue retrouver ici un ami Palestinien qui vit en France: Abou. Il est venu en vacances visiter sa famille pour la premiere fois depuis qu'il est parti. Retrouvailles qui me font plaisir, pleines de nouvelles. Je me sens tellement en confiance avec lui : c'est un ami, nous sommes chez lui, je sais que tout ira bien et ne m'en voudra pas si je suis moi même...
          Il m'emmène découvrir les nouveaux bâtiments de l'École de cirque dans laquelle il était (www.palcircus.ps). Whouah ! Je suis impressionnée, c'est magnifique. On nous raconte un peu la vie de l'école, ses projets, ses activités, ça donne envie de rester, d'apprendre...
          Plus tard nous voila dans un bar en plein centre de cette grosse ville si occidentalisée. Ambiance posée, agréable. Il y a la le directeur de l'école de cirque, un ami prof dans cette école, un danseur chorégraphe, le gérant du bar, Abou et moi. Un feu crépite dans une petite cheminée, des châtaignes y grillent, on écoute Siberie m'était contée,  ça joue aux cartes et blague en arabe... le bonheur est la quelque part...
Dehors, le tumulte.
        
             Le lendemain je prends plus de temps pour voir la ville.                                                                   Il n'y a pas d'espace calme ici. Trop de voitures, trop de monde. Je me demande ou les gens respirent.   
             C'est la journée internationale du handicap, il y a un gros spectacle organisé a cette occasion, nous y allons...Dans la salle (grand luxe) qui se remplie, pleins de jeunes sourds discutent et s'interpellent en signant, on sent l'excitation du show que l'on a longtemps répété, le soir de la première. C'est très beau tous ces gestes qui se croisent sans se gêner, l'effervescence sans le bruit.
          Le spectacle mêle de tout et de façon intelligente : théâtre, danse, musique, lectures, vidéo, peinture.. Avec un public aussi divers. Tout est traduit simultanément en langue des signes..pas en français.. Mon voisin me traduit quelques bouts puis oubli, mais la magie opère tout de même . C'est un moment qui restera en moi. Par moments j'étais émue aux larmes... Comme devant cette troupe de danseurs et danseuses de Dabké (danse traditionnelle Palestinienne) qui n'entendent pas la musique et pourtant s'accordaient parfaitement en suivant des yeux un jeune homme, debout dans le public, qui leur indiquait les temps comme un chef d'orchestre.
Plaisir de se questionner autour de la différence, de l'acceptation de l'autre... Une fois encore de me forcer a quitter le cliche du résistant palestinien pour m'intéresser et comprendre un peu mieux cette société.


jeudi 5 janvier 2012

Noel aux origines

24 décembre


  Le  vent souffle fort ce soir.. Il secoue les branches des palmiers dehors et leur donne des allures de sapins dans la nuit.
  Jour de pluie.
  ...
  Un des premiers depuis mon arrivée. C'est beaucoup d'eau qui tombe, c'est un cadeau pour la terre. C'est une eau qu' Israel ne pourra pas voler, elle nourrira ce sol quoi qu'il advienne de nos guerres d'humains.
   Je projette ma soirée avec Ludo ,un cineo-poète qui est volontaire ici, lui aussi dans mille rêves et mille tornades, entre ici l'Afrique, la France, l'Italie , la Russie et sûrement d'autres ailleurs dont je n'ai pas connaissance..
  Les amis que j'étais venue rejoindre ici sont partis aujourd'hui, a moi de voir ou sont mes propres ancrages désormais.

 On cherche une messe de minuit. Peu m'importe la fête catholique, je cherche la communion. Il paraît qu'ici il y a environ 2000 ans, loin du luxe et des illuminations festives, un type est née qui a changé quelque chose.Quelqu'un qui a du apporter a d'autres pour qu'on ai ainsi envie de se souvenir de son nom et d'écrire sur lui...
  Mais on ne trouvera pas d'église ouverte prête a nous acceuillir ce soir de Noël a Betlehem... La seule Église qui célèbre quoi que ce soit est celle de la Nativité (L'Endroit touristique entre carnaval et religion), dans laquelle on ne rentre que sur "ticket" qu'évidement nous n'avons pas et ne cherchons pas avoir.  Un ticket pour aller a la messe.. Notion bien trop floue pour les âmes de demi-civilisés que nous sommes.
 La ville est pleine de militaires, Abou Mazen (Mahmoud Abbas), "président" de l'autorité palestinienne, est dans la place... écartez vous s'il vous plaît...

 Au détour de nos recherches d'église nous faisons deux rencontres dans lesquelles nous trouvons la communion disparue ailleurs. Deux hommes, taximans tous deux, avec qui nous créons, fabriquons, d'un trajet en taxi ou du partage d'un sandwish, un espace ou se découvrir, se parler, se réjouir de la rencontre avec l'autre...


 Triste impression que ça a quelque chose d'exceptionnel.



 Le lendemain soir, Noël encore, nous faisions une émission de radio, en anglais parce que destinée a la communauté étrangère qui vit dans le coin, les expatries quoi.. Le sujet sort un peu pour une fois des sentiers battus : la relation mère-fille, la transmition parent-enfant, l'éducation. Un sujet qu'on pourrait traiter ailleurs dans le monde, j'en suis heureuse. Nos deux invitées sont géniales, elles brisent les idées reçues et dressent un tableau de leur relation. J'aime leur parole. J'aime comme, touche après touche, elles nous donnent une image de leur rapport, a la fois si banal, a la fois si unique parce que propre a elles mêmes et unique parce qu'elles vivent ici, dans le camps de réfugiés de Deishe et qu'on envisage pas d'éduquer ses enfants de la même façon dans ces conditions de vie et d'avenir, qu'ailleurs...
 J'aime leur parole et je la trouve juste.

 J'essaye de mettre en ligne cette émission mais pour l'instant je fais face aux mystère de la technologie
( je suis de plus en plus persuadée qu'il y a un petit lutin dans cet ordinateur qui s'amuse a me faire faire des trucs bidons et me voir galèrer).
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J'ai du mal a écrire, je digère lentement.. et pourtant il y a a en dire!
Je pars peut être quelques jours dans la vallée du Jourdain j'écrirais donc plutôt le reste a mon retour.