dimanche 8 janvier 2012

Ballade a Ramallah

Ah... enfin, je retrouve l'envie de raconter...

          Dernière semaine de décembre, je me rends pour deux jours vers la capital "politique" : Ramallah.
          C'est la première fois que j'y vais seule, ça me fais un peu un truc au ventre d'avoir a me débrouiller comme une grande fille mais je sais qu'au pire j'arriverais dans la mauvaise ville, et puis je suis contente de gagner en autonomie "chouai chouai".
       
           Le trajet pour y aller, de jour, est un véritable voyage. Comme ces paysages sont beaux...  On dirait le dos de gros animaux assoupis les uns contre les autres( peut être des hippopotames, des rhinocéros, ou des dinosaures disparus, on ne saurait dire). Les plis de leurs peaux sont des sillons creusés par l'eau, le vent, le temps... Ces monts, creux, vallées, collines, qui se touchent, se superposent, si proches, lointains, jouent avec les perspectives. Le relief est doux comme si ici, la terre était plus vielle...
Et nous surplombons tout cela en bus, nous, tous petits.
...Impression d'avoir de la hauteur...


Splendide.

         Les routes et autres empreintes de l'homme me paraissent être des injures, réellement..
C'est la que je me rends compte a quel point je n'ai pas l'habitude d'avoir des vues que nous n'avons pas façonnés. Finalement, nous ne connaissons pas la nature inchangée...

         ...et après tous ces paysages... : les check-points, le mur (électronique d'abord, puis celui en béton..armé), puis les routes spéciales pour les colons, puis les belles routes israélienne "partagées" , puis les panneaux en hébreux , puis les réserves d'eau volée , puis les stations services israéliennes, puis les militaires et les détours que l'on fait pour les éviter...Arrrghh !!!
La question, naïve, me vient sans y réfléchir :   mais pourquoi viennent ils jusque ici ?!?  Pourquoi cette présence partout ?? Nous sommes en Palestine !
L'occupation...
Oui avoir la rage est possible, facile, les raisons en sont omniprésentes.
          Et a la fois la colonisation sait faire "accepter" les pions qu'elle avance. Ce n'est pas pour rien qu'une partie des routes israélienne ont le droit d'être empruntées par les Palestiniens. Et si elles sont superbement entretenues, conçues pour un trafic dense, éclairées... ce n'est pas pour rien qu'elles sont plus pratiques que les routes palestiniennes, avec le temps elles sont devenues presque nécessaires...
(...)

          Ramallah donc,

Un peu d'oxygène dans mon enlisement...

...au centre le quotidien me colle 
           Je suis venue retrouver ici un ami Palestinien qui vit en France: Abou. Il est venu en vacances visiter sa famille pour la premiere fois depuis qu'il est parti. Retrouvailles qui me font plaisir, pleines de nouvelles. Je me sens tellement en confiance avec lui : c'est un ami, nous sommes chez lui, je sais que tout ira bien et ne m'en voudra pas si je suis moi même...
          Il m'emmène découvrir les nouveaux bâtiments de l'École de cirque dans laquelle il était (www.palcircus.ps). Whouah ! Je suis impressionnée, c'est magnifique. On nous raconte un peu la vie de l'école, ses projets, ses activités, ça donne envie de rester, d'apprendre...
          Plus tard nous voila dans un bar en plein centre de cette grosse ville si occidentalisée. Ambiance posée, agréable. Il y a la le directeur de l'école de cirque, un ami prof dans cette école, un danseur chorégraphe, le gérant du bar, Abou et moi. Un feu crépite dans une petite cheminée, des châtaignes y grillent, on écoute Siberie m'était contée,  ça joue aux cartes et blague en arabe... le bonheur est la quelque part...
Dehors, le tumulte.
        
             Le lendemain je prends plus de temps pour voir la ville.                                                                   Il n'y a pas d'espace calme ici. Trop de voitures, trop de monde. Je me demande ou les gens respirent.   
             C'est la journée internationale du handicap, il y a un gros spectacle organisé a cette occasion, nous y allons...Dans la salle (grand luxe) qui se remplie, pleins de jeunes sourds discutent et s'interpellent en signant, on sent l'excitation du show que l'on a longtemps répété, le soir de la première. C'est très beau tous ces gestes qui se croisent sans se gêner, l'effervescence sans le bruit.
          Le spectacle mêle de tout et de façon intelligente : théâtre, danse, musique, lectures, vidéo, peinture.. Avec un public aussi divers. Tout est traduit simultanément en langue des signes..pas en français.. Mon voisin me traduit quelques bouts puis oubli, mais la magie opère tout de même . C'est un moment qui restera en moi. Par moments j'étais émue aux larmes... Comme devant cette troupe de danseurs et danseuses de Dabké (danse traditionnelle Palestinienne) qui n'entendent pas la musique et pourtant s'accordaient parfaitement en suivant des yeux un jeune homme, debout dans le public, qui leur indiquait les temps comme un chef d'orchestre.
Plaisir de se questionner autour de la différence, de l'acceptation de l'autre... Une fois encore de me forcer a quitter le cliche du résistant palestinien pour m'intéresser et comprendre un peu mieux cette société.


2 commentaires:

  1. Bonsoir Valentine,
    Kifalac little sister?
    Merci de nous faire partager tes impressions avec autant de finesse, de sensibilité...et de lucidité!
    Je t'embrasse
    Catherine

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  2. Merci de nous laisser voir que derrière l'entité que l'on nomme "les palestiniens" il y a des humains qui créent des écoles de cirque, utilisent la langue des signes, mangent des châtaignes grillées dans les bars. Le pire c'est que cette "normalité" m'étonne !
    Mercredi prochain, projection en avant première d' "une bouteille à la mer" en présence de la co-scénariste Valérie Zenatti. Je crois que tu avais lu "quand j'étais soldate" non ? Je te raconterai.
    C'est super que tu aies retrouvé l'envie d'écrire. Tu nous régales les yeux, l'imaginaire. Ne manquent que la bande son et les odeurs. A ce propos, tu n'as pas une recette de cuisine à nous faire partager ? Les falafels ?
    Prends soin de toi, amuses toi,
    Des millions de bisous dans ton coeur.

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